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Atelier 2019

Sciences et citoyens : gouvernance, participation et diffusion des connaissances scientifiques

Les avancées de la science et de la technologie impactent directement nos sociétés, dans le présent et pour l’avenir, et génèrent des dilemmes et des controverses de plus en plus nombreuses pour l’humanité et l’environnement. Or, comme en témoigne l’actualité Française, il existe un sentiment de rupture des liens unissant les citoyens à la prise de décisions importantes amenant ainsi à re-questionner les termes mêmes de la démocratie. Selon un sondage SciencesPo-CEVIPOF réalisé en janvier 2019 : “59 % des interrogés sont d’accord avec l’idée qu’il faudrait que ce soient les citoyens et non un gouvernement qui décident ce qui leur semble le meilleur pour le pays”. Mais dans quelle mesure cela concerne-t-il la science ?

Dans le domaine des sciences de la santé par exemple, la Convention d’Oviedo sur les droits de l’homme et la biomédecine de 1997 précise qu’il est nécessaire de veiller “à ce que les questions fondamentales posées par les développements de la biologie et de la médecine fassent l’objet d’un débat public approprié à la lumière, en particulier, des implications médicales, sociales, économiques, éthiques et juridiques pertinentes, et que leurs possibles applications fassent l’objet de consultations appropriées” (Article 28 – Débat public). Cet exemple rappelle que les citoyens sont partie intégrante du domaine scientifique et que la science ne peut se développer qu’en s’interrogeant en concertation avec les populations. En effet, les citoyens sont à la fois en partie des participants à la recherche et, normalement, des bénéficiaires des avancées qui en découlent. L’implication des citoyens à la production, à la diffusion ou à la critique des connaissances scientifiques se développe dans divers contextes et se matérialise sous différentes formes, à différentes échelles, en tant que sciences citoyennes ou sciences participatives.

Dès lors, cet atelier de réflexion propose d’aborder les relations entre la science et les citoyens au travers d’exemples illustrant les pratiques actuelles. Au niveau institutionnel tout d’abord, en prenant l’exemple de nouveaux dispositifs tels que la mise en œuvre d’”États Généraux” (1) ; au niveau des projets de recherche auxquels les citoyens peuvent être associés (2), et lorsque la connaissance scientifique se fait citoyenne ou participative (3). Ainsi les trois volets de cet atelier sont complémentaires afin de débattre de l’implication des citoyens dans la science au regard des “nouveaux” attendus exprimés par une partie de la société.


  • Volet 1 – La participation dans l’élaboration et l’évaluation des politiques scientifiques
  • Volet 2 – La participation à des projets de recherche
  • Volet 3 – La contribution “en amateur” à la connaissance scientifique


Programme

La participation dans l’élaboration et l’évaluation des politiques scientifiques – 11 avril, Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées

 


Animatrice
  • Emmanuelle Rial-Sebbag, Juriste, Directrice de recherche INSERM – UMR 1027, Responsable de la Chaire UNESCO « Éthique, Science et Société », Responsable de la Plateforme Ethique et Biosciences (Genotoul Societal).

 

Intervenants
  • Florence Taboulet, Professeur de Droit pharmaceutique et Economie de la santé, Faculté des Sciences pharmaceutiques – Université Toulouse III – Paul Sabatier, UMR 1027 Inserm, Membre de l’Espace Régional Ethique Occitanie.
  • Laurent Baccella, Chargé de mission « Agroalimentaire et filières végétales » au Service Régional de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire (SRAA) de la Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF) Occitanie.

 

Actuellement, les citoyens sont invités à donner leur avis sur un nombre importants de sujets les concernant, que ce soit sur leur dernier repas au restaurant, leur hébergement de vacances ou leurs achats en lignes. Ils peuvent dorénavant partager leur opinion ou leur expérience personnelle au travers de diverses initiatives ouvrant à la contribution de chacun dans l’évaluation et l’élaboration des politiques scientifiques.

 

En 2018, les Etats Généraux de la Bioéthique se sont inscrits dans cette dynamique, sous l’égide du Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) qui a coordonné « l’organisation de ce débat public comme un véritable exercice de démocratie sanitaire, en invitant à la fois les citoyens, profanes ou avertis, mais aussi les experts, à exprimer leurs opinions et à discuter ensemble » (Rapport de synthèse du CCNE, p. 12-13). Bien que la dernière étape de ce processus ait dû être reportée nous pouvons déjà établir un premier bilan de la mise en œuvre de cette modalité de consultation des publics.

 

Dans le même esprit, en 2017, les Etats Généraux de l’Alimentation se sont tenus, ont donné lieu à un rapport permettant dès lors un regard rétrospectif sur le processus de consultation. Organisée par le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, en collaboration avec l’ensemble des ministères compétents, cette consultation a permis de réunir « toutes les parties prenantes : monde agricole et de la pêche, industrie agroalimentaire, distribution, consommateurs, restauration collective, élus, partenaires sociaux, acteurs de l’économie sociale et solidaire, et de la santé, ONG, associations caritatives et d’aide alimentaire à l’international, banques et assurances. Et aussi les citoyens ! via une grande consultation publique qui a accueilli plus de 156 000 personnes. » (#EGalim en clair).

 

Ces processus de consultation se sont appuyés sur différentes modalités (ex : auditions d’institutions et d’associations représentant divers intérêts et courants philosophiques, scientifiques ou religieux ; ateliers, rencontres et débats d’experts et de citoyens). L’ensemble de ces éléments ont ensuite donné lieu à la publication de rapports et d’avis présentés aux institutions disposant du pouvoir politique et législatif.

En partant de ces deux expériences il convient de s’interroger sur la pertinence des outils de consultation publique mis en place, et sur l’impact de leurs résultats sur l’évolution législative qui en découle. Comment se sont déroulées ces initiatives ? De quelle manière quantifier la représentativité des citoyens s’étant exprimés sur les différentes thématiques ? Dans quelle mesure cette « parole citoyenne » est-elle prise en compte au regard de la « parole experte » ? Les différents points de vue exprimés lors de cette consultation ont-ils bien été retranscrits ? Quelles leçons peut-on/doit-on en tirer ? Autant de questions qui pourront être discutées au cours de cet atelier.

 


La participation à des projets de recherche – 9 mai, Faculté de Médecine de Toulouse

 


Animateur
  • Gauthier Chassang, Juriste, UMR 1027 Inserm-Université Paul Sabatier, US 13, Co-Responsable de la Plateforme Ethique et Biosciences (Genotoul Societal).

 

Intervenants
  • Bettina Couderc, Professeur de biotechnologies, UMR 1027 – Université Paul Sabatier, Institut Claudius Regaud – Oncopole, Membre de la Plateforme Ethique et Biosciences (Genotoul Societal).
  • Flavie Mathieu, Docteur en santé publique, Mission Associations de l’Inserm, Département de l’information scientifique et communication.

 

La participation des citoyens à la science revêt différentes formes. L’une d’elle est l’engagement des citoyens (qu’ils soient patients ou volontaires) dans les projets de recherche portés par divers organismes de recherche, publics ou privés, y compris associatifs, au niveau National, Européen ou International.  Encouragée dans de nombreux pays, la science participative est promue en tant que mécanisme permettant d’améliorer l’efficacité, la qualité et la pertinence de la recherche, ainsi que la transparence et la confiance dans la science. Appliquée à des projets de recherche cette implication peut ainsi concerner tout le monde, du citoyen intéressé par les questions scientifiques et hypothèses formulées dans ces projets, au citoyen directement concerné par une recherche du fait de sa situation, parce qu’il est par exemple atteint d’une pathologie dont l’étude vise à mieux comprendre les mécanismes de développement de la maladie, ses moyens de détection et de prévention, ou les voies d’amélioration diagnostiques et thérapeutiques. L’implication des citoyens dans un projet de recherche peut se faire à différents niveaux, quel que soit leur objectif scientifique, leur échelle géographique et leur méthodologie, et recouvrir plusieurs réalités, avec plus ou moins de risques et de contraintes pour le participant qui bénéficiera d’une protection garantie par le droit et les bonnes pratiques médicales.

 

Comment les citoyens sont-ils impliqués dans les projets de recherche ? Quelles sont les mesures de protection des participants ? A quelle(s)  étape(s) de la recherche les citoyens sont-ils impliqués et pour quoi faire ? Quels sont les impacts de cette implication ? Celle-ci est-elle efficace et positive ? Quelles questions éthiques se dégagent des pratiques actuelles ? Quelles innovations pourraient améliorer cette démarche ?

 

Cet atelier, au travers de la présentation d’exemples de différentes initiatives visant à impliquer les citoyens dans les projets de recherche, amène à questionner et débattre du système actuel soutenant ce mouvement participatif au sein de projets institutionnels.

 


La contribution “en amateur” à la connaissance scientifique – 6 juin, Faculté de Médecine de Toulouse

 


Animatrice
  • Laurence Huc, Chargée de recherche INRA en toxicologie alimentaire, Responsable de l’équipe Contaminants & Stress cellulaire, ToxAlim UMR 1331 INRA-INP-UPS, Toulouse, et Membre de la Plateforme Ethique et Biosciences ( Genotoul Societal).

 

Intervenants
  • Mélina Macouin, Chercheuse au CNRS, Laboratoire Géosciences Environnement Toulouse (GET), Observatoire Midi-Pyrénées – CNRS/UPS/IRD/CNES.
  • François Montastruc, Docteur, Chef de Clinique du service de Pharmacologie Médicale et Clinique du CHU de Toulouse, Centre Régional de PharmacoVigilance (CRPV), UMR 1027 Inserm – Université Toulouse III Paul Sabatier.
  • Brice Navereau, Docteur en Géographie-Aménagement, Chercheur associé au LISST-Cieu (Laboratoire Interdisciplinaire Solidarités, Sociétés, Territoires, UMR 5193, EHESS), Université Toulouse II Jean Jaurès, Fondateur de la Jeune Entreprise Universitaire Echelles et Territoires.

 

La production de savoir et de la connaissance est une des missions de la recherche académique. Cependant, force est de constater que cette activité s’est peu à peu éloignée de la société civile, cantonnant l’excellence du savoir à la fameuse tour d’ivoire. Ainsi, on assiste à un désintéressement de la société pour les réponses que peuvent apporter la science et à un fossé qui se creuse entre la recherche académique qui se déconnecte des réels enjeux sociétaux et le besoin pour les citoyens et citoyennes de pouvoir bénéficier de la science pour améliorer leur qualité de vie. Cependant, la production de connaissance dans sa conceptualisation et sa pratique est à la portée de toutes et tous et permet ainsi de repositionner les priorités pour que la science est un réel impact sociétal.

 

C’est dans ce contexte que les sciences participatives prennent leur essor, sous des formes toutes aussi variées que les problématiques soulevées : la santé, l’environnement, la biodiversité, notamment. Dans ce cadre, les chercheur.e.s « professionnels » peuvent être impliqués mais l’originalité et la force viennent de ces recherches « en amateur » qui aboutissent à des résultats présentés autrement que dans des journaux scientifiques académiques et ayant des conséquences concrètes sur la société civile. Les méthodes d’acquisition de connaissances dans ce contexte sont à élaborer en amont afin de pouvoir répondre à des critères de qualité permettant de valoriser ce savoir produit « hors les murs du laboratoire ».

 

Cet atelier permettra d’aborder la question de la contribution « en amateur » à la connaissance scientifique, à travers des initiatives mises en place, mais aussi des structures qui permettent d’appuyer et de soutenir de telles démarches.