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Atelier 2013

Enjeux éthiques du séquençage du génome humain

Le développement galopant des technologies de séquençage des génomes dites de nouvelle génération, associé à la diminution conséquente des coûts impliqués, ouvre la voie à des applications que l’on n’imaginait pas aussi proches il y a quelques années, en particulier en ce qui concerne le génome humain. Quelles sont les conséquences de cette capacité de séquençage intégral du génome (génome entier) ou de l’ensemble des parties du génome correspondant aux gènes eux-mêmes (exome entier) pour quelques centaines d’euros ? Qui propose ce séquençage ? Qui le réalise, qui le demande  et qui s’en sert ? De quelles données parle-t-on : données “brutes” au sortir de la machine, données organisées, données interprétées ? Y-a-t-il des risques associés à une telle capacité à générer des données génétiques sur les personnes ? Comment gérer l’accès et que devient la notion d’anonymat ? Nos régulations actuelles sont-elles suffisantes ? Ces développements changent-ils la perception de la génétique dans la société ? Quels changements apportent-ils à la pratique des professionnels de santé, de l’industrie ou de la recherche concernés ? Ces questions seront abordées en 3 volets complémentaires.


  • Volet 1 – La médecine basée sur les données ? La responsabilité de la communication de résultats et de découvertes fortuites dans le cadre du diagnostic
  • Volet 2 – La protection des données et son évolution à l’ère du séquençage du génome des personnes
  • Volet 3 – Mise à disposition de données de séquences générées en recherche ou dans le cadre de séquençage proposé directement au consommateur

Programme

La médecine basée sur les données ? La responsabilité de la communication de résultats et de découvertes fortuites dans le cadre du diagnostic – 18 avril, Faculté de Médecine de Toulouse


Animatrice
  • Anne Cambon-Thomsen, Médecin généticienne, Directrice de recherche émérite au CNRS, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III, Responsable de la Plateforme Genotoul Societal et Présidente de la Société Française de Génétique Humaine
Intervenantes
  • Perrine Malzac, Praticienne hospitalière au sein du Département de génétique médicale et Coordinatrice de l’Espace Ethique Méditerranéen, UMR 7268 ADES, Marseille
  • Alexandra Soulier, Doctorante en philosophie et Diplômée de sciences politiques, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III

Avec la mise en œuvre en pratique clinique génétique des technologies dites à haut débit qui étudient de larges parties du génome et parfois le génome entier des patients, se posent des questions relatives aux valeurs en jeu dans un tel transfert de technologie. Les données générées à cette occasion donnent accès à d’autres informations que celles strictement nécessaires pour répondre à la question le plus souvent diagnostique qui se pose au jour du test. La complexité des données amène à faire appel à des logiciels de bioinformatique et révèle des données de différents “statuts” : variations connues en rapport avec la pathologie présente, variations connues mais en rapport avec une autre pathologie ou un autre phénotype que ce qui motive le test, variations connues mais dont l’interprétation n’est pas certaine, ou ne représente qu’un facteur de risque à replacer dans un contexte, variations nouvelles que l’on ne sait pas interpréter et dont on ne connaît pas l’éventuelle signification clinique. Bref si les diagnostics deviennent plus fins, des questions nouvelles se posent : que faut-il regarder ? Qui choisit ce qui doit être regardé ? Quels résultats et informations transmettre ? Dans le contexte d’une connaissance de la génétique qui évolue vite que faut-il conserver comme résultats ? Dans quelles conditions de telles données peuvent-elles être utilisées pour la recherche de connaissances nouvelles sur la compréhension des génomes ? Qu’en pensent les patients et les professionnels de santé ? Au travers des regards d’un médecin généticien impliquée dans un espace éthique et d’une philosophe travaillant notamment sur les enjeux des transferts de technologies, les bases d’une discussion d’actualité peuvent être posées.


La protection des données et son évolution à l’ère du séquençage du génome des personnes – 30 mai, Hôtel de Région, Toulouse


Animatrice
  • Emmanuelle Rial-Sebbag, Juriste, Chargée de recherche, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier-Toulouse III, Membre de la Plateforme Genotoul Societal
Intervenants
  • Anne Cambon-Thomsen, Médecin généticienne, Directrice de recherche CNRS, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III, Responsable de la Plateforme Genotoul Societal
  • Gauthier Chassang, Juriste, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III, Membre de la Plateforme Genotoul Societal

Les nouvelles possibilités d’amélioration de la santé humaine offertes par l’utilisation de données de séquences sont largement saluées dans le monde médical et scientifique. Cependant la qualité et la quantité grandissante de cette production de données laisse place à des questions notamment concernant les risques et les enjeux pour les personnes dont sont issues ces données. Qualifiées de données personnelles, les données de séquence sont également juridiquement qualifiées de données de santé sensibles. En effet, tant le droit de l’Union européenne que le droit français, traitent de manière particulièrement rigoureuse ces données du fait qu’elles permettent théoriquement d’identifier les personnes dont elles sont issues. La notion d’identification est centrale dans ce dispositif de protection puisqu’elle permet de doter les individus de droits variés et multiples au regard du recueil et du traitement de leurs données. De même le respect de la confidentialité et de la vie privée, ainsi que l’obligation de recueil d’un “consentement” complètent les droits et devoirs exigés en la matière par le droit, ainsi que recommandés par l’éthique. L’avènement des nouvelles techniques de séquences, du fait de la grande masse d’informations générées, de leur facile communication notamment par Internet et de leur (future ?) utilisation en clinique, vient réinterroger l’ensemble des dispositifs de protection mis en œuvre par la loi, mais également vient redéfinir des notions éthiques jusqu’alors bien décrites.


Mise à disposition de données de séquences générées en recherche ou dans le cadre de séquençage proposé directement au consommateur – 27 Juin, Muséum d’Histoire Naturelle, Toulouse


Animateur
  • Pascal Ducournau, Sociologue, Enseignant – Chercheur, Université de Toulouse – CUFR JF Champollion, Inserm
Intervenants
  • Heidi C. Howard, Ph.D. Chercheur titulaire d’une bourse Marie Curie, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III,  Director, Indiana University Center for Bioethics
  • Eric M. Meslin, Ph.D. Chaire d’Excellence Pierre de Fermat, UMR 1027 Inserm et Université Paul Sabatier – Toulouse III, Director, Indiana University Center for Bioethics

 


Ces vingt dernières années, des progrès technologiques considérables ont été réalisés dans le cadre de l’étude des gènes et du génome. Ils ont notamment entraîné une réduction drastique du coût du séquençage des génomes entiers, ce qui s’est traduit par une plus large utilisation de cette technique aussi bien en recherche qu’en clinique. Après avoir brièvement présenté la nouvelle technologie dite séquençage de nouvelle génération (next generation sequencing, NGS), Dr. Howard discute de son rôle dans l’amélioration des connaissances en génétique et en génomique dans un contexte de recherche. Les questions éthiques qui se posent dans ce cadre, tels que le consentement, le retour des résultats et le respect de la vie privée sont également évoquées. Dr. Meslin se penche ensuite sur les questions éthiques concernant le transfert de la technologie NGS du laboratoire à la clinique. Comme de nombreuses technologies génétiques, la technologie NGS constitue un outil puissant pour mieux appréhender le contenu du génome humain. Et, comme beaucoup de technologies génétiques, elle laisse augurer de nombreux bénéfices pour les patients et la société de par les capacités améliorées qu’elle offre, en particulier l’augmentation de la vitesse, la précision et la réduction des coûts. Cela ouvre la porte à de nombreuses applications cliniques, des tests génétiques pour les maladies à la conception de meilleurs médicaments grâce à la pharmacogénomique.

Cette partie de l’exposé met en évidence deux types de questions éthiques soulevées par ce genre de développement technologique : la première concerne les vifs espoirs suscités par le transfert trop rapide de technologies vers la clinique et la déception cuisante quand la “bulle d’attente” se dégonfle. Il faut tenir compte de ces torts causés aux individus. Le second problème éthique est plus largement sociétal, impliquant des décisions politiques en science et santé : nous pourrions raisonnablement nous demander si la société devrait dépenser son argent dans la technologie NGS alors qu’il existe d’autres moyens abordables d’améliorer la santé humaine. Après avoir évoqué le séquençage du génome entier dans le contexte de la recherche et de la clinique, la présentation se poursuit par l’intervention du Dr. Howard qui s’intéresse à la question de l’accessibilité directe de la technologie NGS pour le consommateur (DTC). L’objectif principal étant de savoir si cette offre soulève de nouvelles questions éthiques par rapport à l’offre actuelle de tests génétiques “ordinaires” en libre accès.